Élections américaines 2024: comment la crise du logement a façonné la victoire de Trump et surtout la défaite de Kamala Harris

Les élections américaines de 2024 auront été marquées par un retour inattendu de Donald Trump et l’échec retentissant de Kamala Harris, pourtant soutenue par les démocrates et Joe Biden. Alors que les résultats sont encore fraîchement analysés, un constat émerge avec force : la crise du logement, devenue un problème endémique aux États-Unis, a joué un rôle important dans cette élection, notamment auprès de l’électorat démocrate. Les propositions du camp démocrate n’ont pas été à la hauteur des attentes et les alertes ont été données sans être entendues.

Face à une situation qui impacte autant les locataires que les propriétaires, la question de l’accessibilité au logement s’est imposée comme un thème brûlant pour des millions d’Américains, contraints de dédier une part toujours plus importante de leur budget pour se loger.

En effet, avec des prix immobiliers en hausse de 9 % par an en moyenne et des taux d’intérêt qui grimpent depuis plusieurs mois, la propriété immobilière, perçue comme un pilier du rêve américain, semble désormais hors de portée pour de nombreuses familles de la classe moyenne. Que ce soit dans les grandes villes ou dans les zones périurbaines, les Américains voient leurs perspectives d’accession à la propriété s’éloigner, tout en faisant face à des loyers qui atteignent des niveaux record. Les tensions économiques ont donc fait de la question du logement un enjeu électoral majeur pour une grande partie de l’électorat, influençant directement leur choix de vote.

Dans ce contexte tendu, les candidats ont tenté de proposer des réponses contrastées se rendant compte de l’importance de ce sujet notamment pour l’électorat démocrate ou indécis. Kamala Harris, avec un programme d’aides ciblées pour les primo-accédants et un fonds de 40 milliards de dollars pour accroître l’offre de logements abordables, se voulait proche des préoccupations des classes moyennes et populaires. Donald Trump, quant à lui, a misé sur une politique plus axée sur le marché et la disponibilité foncière, promettant de libérer des terrains fédéraux pour relancer la construction et réduire les contraintes qui pèsent sur l’offre immobilière.

Mais alors que le verdict des urnes est tombé, une question persiste : comment la crise du logement a-t-elle influencé la victoire de Donald Trump et la défaite de Kamala Harris ? En analysant de près les données et les dynamiques de cette élection, nous explorerons l’impact de cette crise sans précédent sur le choix des électeurs et les perspectives pour les années à venir.

I. La crise du logement aux États-Unis : un enjeu électoral majeur

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A. Une préoccupation croissante pour les Américains

La crise du logement s’est imposée comme l’un des enjeux économiques et sociaux parmi les plus pressants aux États-Unis. Aujourd’hui, se loger représente une part significative du budget des ménages, notamment pour les locataires et les primo-accédants, dont les espoirs d’accéder à la propriété sont de plus en plus compromis. Selon les dernières données, les prix de l’immobilier ont bondi de 9 % par an en moyenne depuis cinq ans, une hausse qui met la propriété immobilière hors de portée pour des millions d’Américains​. Dans certains “swing states”, le prix moyen d’une maison a augmenté de +40%.

De plus, environ 21 millions de ménages américains consacrent désormais plus de 30 % de leurs revenus aux dépenses de logement, un seuil critique souvent utilisé pour évaluer le “fardeau du logement”​. Cette situation engendre une tension économique de plus en plus difficile à gérer, d’autant plus pour les familles de la classe moyenne, qui doivent faire des choix de plus en plus contraignants pour maintenir leur niveau de vie. Le rêve américain, autrefois symbolisé par l’accession à la propriété, semble s’éloigner pour une majorité de citoyens, laissant place à un sentiment de frustration qui se manifeste aussi dans les urnes.

B. Le “double choc” immobilier

La crise du logement aux États-Unis se caractérise par un “double choc” pour les ménages semblables à la situation en France : la hausse continue des prix des biens immobiliers s’accompagne désormais de taux d’intérêt élevés, rendant l’acquisition de biens encore plus inaccessible. 

Les taux hypothécaires, qui avoisinent les 7 % pour la première fois depuis des décennies, érodent la capacité d’achat des acheteurs potentiels, réduisant leur pouvoir d’acquisition de plusieurs milliers de dollars​. Cette situation est particulièrement alarmante pour les jeunes familles et les travailleurs de la classe moyenne, qui se retrouvent de plus en plus exclus du marché immobilier.

Pour beaucoup, la propriété immobilière est bien plus qu’un investissement : elle est perçue comme une porte d’entrée vers la classe moyenne et l’ascension sociale. En perdant cet accès, de nombreux Américains ressentent une forme de déclassement social, ce qui accentue la polarisation politique et alimente les frustrations envers l’administration en place. 

En effet, l’impact de cette crise immobilière dépasse le cadre strict de l’économie : il influence la perception générale des électeurs vis-à-vis de leur situation et de leur avenir, orientant leur vote vers l’abstention ou vers des candidats porteurs de solutions faciles et concrètes pour améliorer leur pouvoir d’achat.

C. Des impacts régionaux marqués

Bien que la crise du logement touche l’ensemble des États-Unis, elle se fait particulièrement sentir dans les régions à forte densité de population et dans les États “bleus”, qui penchent historiquement vers les démocrates et soutiennent Kamala Harris. Ces États, comme la Californie, New York ou le Massachusetts, sont également ceux où les coûts de l’immobilier atteignent des sommets, exacerbant les inégalités d’accès au logement. La moyenne des prix dans ces régions dépasse largement celle des États “rouges” (républicains), ce qui explique pourquoi les électeurs de Harris ont été plus nombreux que ceux de Trump à affirmer que la question de l’accessibilité au logement influençait leur vote​.

Ce phénomène est également lié aux politiques locales, souvent plus restrictives en matière de construction, notamment en raison de réglementations environnementales et urbaines plus strictes. Dans ces États, les difficultés d’accès au logement sont d’autant plus visibles et ressenties au quotidien, ce qui renforce l’importance de ce sujet dans la campagne électorale. Les candidats démocrates, traditionnellement plus enclins à promouvoir des aides au logement, se retrouvent à répondre à des attentes élevées de la part de leur électorat, qui espère des solutions concrètes pour améliorer leur situation.

Ainsi, les tensions autour du logement dans ces États “bleus” montrent à quel point cette question a façonné l’électorat démocrate, tout en illustrant une fracture géographique et sociale marquée entre les États. La crise du logement, qui frappe particulièrement la classe moyenne des grandes métropoles, aura finalement joué un rôle décisif dans le basculement des voix vers un candidat républicain, perçu comme porteur de solutions plus radicales pour libérer le marché immobilier et favoriser l’accessibilité, en absence d’un véritable programme de rupture de l’administration démocrate sortante. 

II. Les réponses des candidats aux élections américaines à la crise du logement

A. Le programme de Kamala Harris : des aides pour l’accession à la propriété

Consciente de l’importance de la question du logement pour des millions d’Américains, Kamala Harris a axé une partie de son programme sur des mesures visant à rendre l’accession à la propriété plus abordable. L’une de ses propositions phares était l’allocation d’une aide de 25 000 $ pour les primo-accédants, un soutien financier destiné à aider les jeunes familles et les acheteurs de première fois à constituer un apport pour l’achat d’un logement​. Ce dispositif visait particulièrement les familles de la classe moyenne, pour lesquelles l’achat d’un bien immobilier représente un objectif souvent hors d’atteinte, compte tenu de la hausse des prix et des coûts d’emprunt.

En parallèle, Harris a proposé la création d’un fonds de 40 milliards de dollars dédié à la construction de logements abordables. Cet investissement visait à élargir l’offre de logements dans les zones à forte demande, une initiative censée répondre aux besoins des populations urbaines et périurbaines, là où la crise du logement est la plus prononcée. Les objectifs de ce fonds allaient au-delà de la simple augmentation de l’offre : il s’agissait aussi de réguler les prix des loyers, d’encourager la mixité sociale et de redonner une stabilité aux ménages qui peinent à trouver des logements accessibles dans les grandes métropoles américaines​.

En somme, le programme de Kamala Harris était conçu, selon la candidate, pour offrir un soutien direct aux ménages en difficulté, en particulier dans les États “bleus” où les prix élevés pèsent lourdement sur la classe moyenne. Sa stratégie visait à répondre aux attentes d’une base électorale démocrate largement urbaine, pour laquelle la question du logement abordable est devenue un besoin urgent et incontournable.

Cependant, le manque d’ambition réelle et l’absence de mesure lors de la présidence Biden, dont Kamala Harris était vice-présidente, a joué sur la crédibilité des propositions du camp démocrate. De plus, une véritable absence de prise de position sur le dérèglement climatique “pour ne pas froisser un électorat climato sceptique”, qui est la raison avancée par l’équipe de Harris elle-même, a mis un doute sur l’honnêteté de la candidate auprès de l’électorat historique. 

B. Les promesses de Donald Trump : une approche centrée sur le marché… et la discrimination – copie conforme des macronistes/RN

À l’opposé, Donald Trump a proposé une approche plus libérale et centrée sur le marché, estimant que le secteur privé, en partenariat avec des mesures fédérales, pourrait répondre plus efficacement à la crise du logement. Son programme prévoyait d’ouvrir de vastes étendues de terres fédérales pour la construction de nouveaux logements, réduisant ainsi la pression sur les terrains privés dans les zones urbaines et périurbaines​. 

Cette mesure visait à stimuler rapidement l’offre de logements, en particulier dans les régions où l’urbanisation reste possible. En libérant ces terres, Trump espérait encourager une construction massive, ce qui pourrait entraîner une baisse des prix par l’augmentation de l’offre.

Par ailleurs, Trump a également abordé la question de l’immigration, un thème récurrent dans les campagnes de l’extrême droite, aux USA comme en France. Il a avancé l’idée que les logements sociaux étaient, selon lui, “disproportionnellement occupés par des immigrants” et a proposé de restreindre l’accès à ces logements pour favoriser les citoyens américains de longue date​. 

C’est d’ailleurs une position portée par le parti de l’extrême droite raciste et nationaliste “Rassemblement National” en France. Si cette position a provoqué quelques réticences, à défaut d’une véritable résistance, des bailleurs sociaux, aucune structure professionnelle de l’immobilier ne s’est réellement mise debout face à ces allégations. Et pourtant, le sujet, largement documenté, n’a jamais mis en évidence un lien entre l’immigration et la crise du logement, en France comme aux Etats-Unis. 

Cette position, bien que controversée, s’inscrivait dans une perspective protectionniste générale et visait à “faire de la place” aux citoyens les plus touchés par la crise du logement. Trump a ainsi cherché à polariser l’électorat, en opposant une vision “pro-business” et nationaliste à la solution interventionniste défendue par Harris.

L’argument central de Trump repose sur une approche qui privilégie le marché et les intérêts des contribuables américains, suggérant que moins d’interventions directes de l’État et une ouverture du foncier permettraient d’accroître naturellement l’accès au logement pour les familles de la classe moyenne. Cette vision a trouvé un écho particulier auprès des électeurs conservateurs, qui perçoivent le marché libre, et le moins de l’Etat, comme le levier le plus efficace pour résoudre la crise sans alourdir le fardeau fiscal.

Encore une similitude avec la France, étant donné que le programme libéral des marconistes et celui de Trump se rejoignent sur une bonne partie des points. Depuis la mise en place du gouvernement Barnier et l’entrée de la droite au gouvernement, sous la tutelle de l’extrême droite, les similitudes entre le programme de Trump pour le logement et celui que l’on retrouve en France sont davantage accentuées.

C. Réactions des électeurs aux programmes

La question du logement étant particulièrement polarisante, les propositions de chaque candidat ont suscité des réactions contrastées au sein de leurs électorats respectifs. Pour les partisans de Kamala Harris, son programme a été perçu comme une réponse directe aux problèmes économiques et sociaux actuels, mais sans véritable rupture avec les politiques précédentes et sans ambition. 

Bien que les aides ciblées pour les primo-accédants et l’investissement dans les logements abordables aient rassuré une partie de l’électorat démocrate qui voit en l’intervention de l’État un moyen essentiel pour corriger les inégalités et offrir des opportunités d’ascension sociale, le résultat montre qu’une partie de la base a choisi une autre voie​.

En revanche, les promesses de Donald Trump ont touché une corde sensible chez les électeurs républicains, et de toute évidence chez les indécis et peut-être même des démocrates, en particulier ceux qui rejettent les solutions centralisées et les aides publiques excessives.

La proposition républicaine d’ouvrir des terres fédérales pour la construction de logements a été perçue comme une solution pragmatique qui favorise la croissance économique sans recours aux subventions, une approche appréciée dans les États conservateurs où les électeurs sont moins enclins à soutenir des dépenses publiques pour le logement. De même, sa position sur l’immigration a trouvé un écho favorable auprès de sa base électorale, historiquement raciste et xénophobe, qui y voit un moyen de prioriser les citoyens dans l’attribution des logements sociaux.

Ces réactions contrastées montrent à quel point les solutions proposées par les deux candidats ont exacerbé la polarisation du pays, chaque camp ayant des attentes et des perceptions radicalement différentes quant aux moyens de résoudre la crise du logement.

Pour de nombreux électeurs, le choix entre la candidate démocrate et Trump devait être aussi un choix de valeurs : d’un côté, un modèle de solidarité nationale et de soutien public ; de l’autre, une vision de marché libre et de protection des intérêts américains. Si l’équipe Trump a mené la campagne en portant un message très clair auprès de sa cible et au-delà, Kamala Harris, quant à elle en essayant de “ne pas froisser”, a de toute évidence totalement raté la sienne. 

III. Logement et vote économique : un facteur de bascule ?

A. L’impact émotionnel et social de la crise du logement

Pour des millions d’Américains, la crise du logement dépasse le cadre économique ; elle est une source profonde de stress et d’incertitude. L’accès à un logement abordable n’est pas seulement une question de finances, mais un pilier fondamental de la stabilité et de la sécurité sociale. 

En effet, posséder un logement ou avoir la possibilité d’en acquérir un est souvent perçu comme un droit, et même comme une étape incontournable dans la réalisation du “rêve américain”. Lorsque ce rêve devient inaccessible, il en résulte une frustration et un sentiment d’injustice qui résonnent puissamment au sein de la société. (pour plus d’informations sur le sujet, source : Source : Urban Institute.)

Ce fardeau pèse particulièrement sur la classe moyenne, qui se retrouve de plus en plus exclue du marché immobilier, faute de moyens financiers pour faire face à la hausse des prix et aux taux d’intérêt élevés. Ces ménages, politiquement stratégiques pour les deux partis, voient dans la crise du logement une menace pour leur statut et leur avenir économique. Pour eux, le logement représente un levier essentiel pour gravir les échelons sociaux, constituer un patrimoine et offrir une stabilité à leurs enfants. 

Cet enjeu est devenu d’autant plus important qu’il touche désormais une frange de la population autrefois épargnée par les difficultés d’accès au logement : des familles à revenus moyens qui, malgré un emploi stable, peinent à trouver des solutions de logement abordables dans des zones en forte croissance économique. Ainsi, l’angoisse liée à l’accessibilité au logement s’est imposée comme un facteur émotionnel décisif dans leur choix de vote, les poussant à privilégier le candidat qu’ils perçoivent comme le plus à même de défendre leurs intérêts et de proposer des solutions concrètes.

B. Kamala Harris, victime de l’impopularité de l’administration sortante ?

Dans le cadre de cette élection, Kamala Harris a dû composer avec un handicap majeur : l’association de la crise du logement à l’administration Biden, dont elle était la vice-présidente. Depuis l’arrivée de Biden au pouvoir, le coût de la vie, incluant le logement, a augmenté de manière significative, alimentant le ressentiment de nombreux Américains envers les démocrates. 

Cette crise, perçue par certains comme la conséquence de politiques économiques peu efficaces, a donné lieu à une “punition électorale” typique des votes économiques, où les électeurs sanctionnent les candidats associés à des difficultés financières. Cette situation a été particulièrement difficile pour Harris, qui, en tant que représentante du parti en place, a dû porter le poids des mécontentements liés aux conditions économiques actuelles, y compris la hausse des prix de l’immobilier et les taux d’intérêt qui grèvent le pouvoir d’achat des classes moyennes, tout en ayant un programme politique et économique médiocre.

Par ailleurs, les solutions proposées par Harris n’ont pas suffi à dissiper l’idée que l’administration démocrate n’a pas su juguler les problèmes d’accessibilité au logement. Les aides proposées, telles que l’allocation pour les primo-accédants et les fonds dédiés aux logements abordables, ont été perçues par certains électeurs comme des “pansements” sur une situation plus complexe, où les solutions à court terme semblaient l’emporter sur une véritable réforme structurelle. En ce sens, Harris a été victime d’un climat de défiance envers l’administration en place, qui l’a fait apparaître comme un choix moins efficace pour résoudre cette crise aux yeux de nombreux Américains.

C. Donald Trump et l’attrait du “changement”

Donald Trump, de son côté, a su tirer parti de ce mécontentement pour se positionner en véritable alternative. En s’appuyant sur une rhétorique de “changement” et en promettant des réformes radicales dans le secteur immobilier, il a incarné pour beaucoup une réponse plus ferme face à la crise du logement. Sa stratégie a consisté à se présenter comme un candidat pro-business capable de relancer le marché immobilier par le biais de la libération des terres fédérales et de la réduction des réglementations qui, selon lui, freinent la construction de nouveaux logements​.

Trump a ainsi capitalisé sur l’idée que les difficultés des électeurs sont la conséquence de la “bureaucratie démocrate” et des politiques restrictives en matière de développement immobilier, particulièrement dans les zones où les prix de l’immobilier sont élevés. En s’opposant directement aux approches interventionnistes de Harris, il a su séduire les électeurs qui voyaient en lui un candidat de rupture, promettant une réponse “pro-marché” et favorable à l’expansion de l’offre immobilière. 

De plus, Trump a habilement nourri le racisme et la xénophobie de certains électeurs, notamment en remettant en question l’attribution des logements sociaux aux immigrants, se positionnant ainsi comme le candidat des “Américains de souche” et renforçant son attrait auprès de l’électorat conservateur. 

En somme, Trump a utilisé la crise du logement, qui n’était pas forcement la première préoccupation pour son électorat historique, pour incarner le changement et rediriger la colère des électeurs vers une vision plus libérale et plus nationaliste-blanc de l’économie et de la politique, qu’il présentait comme la clé pour redresser le marché immobilier, entre autres. 

En promettant une libération rapide de l’offre, il a su convaincre les Américains, peut-être même les démocrates, que la solution résidait dans une révision des politiques actuelles, capitalisant ainsi sur le désir de transformation de la part d’un électorat frustré par les échecs et le manque d’audace des démocrates dans ce domaine.

IV. Le poids des perceptions économiques sur le choix final

A. L’influence des anticipations de baisse des taux hypothécaires

Dans un contexte économique tendu, marqué par des taux hypothécaires atteignant leur plus haut niveau en plusieurs décennies, l’impact des anticipations sur le vote des électeurs ne peut être sous-estimé. Un sondage d’Ipsos commandé par Redfin avant l’élection révèle que 32 % des Américains pensaient que l’élection de Donald Trump permettrait de faire baisser les taux hypothécaires, contre seulement 23 % pour Kamala Harris​. Cette perception est cruciale, car elle reflète une croyance répandue selon laquelle la politique économique républicaine, davantage axée sur le marché et la croissance, pourrait offrir une bouffée d’air aux ménages aspirant à accéder à la propriété.

L’accessibilité des taux d’intérêt reste un sujet particulièrement sensible, car ces derniers influencent directement le coût des crédits immobiliers et donc le pouvoir d’achat des Américains en matière de logement. De nombreux électeurs, notamment de la classe moyenne, considèrent les taux d’intérêt comme un baromètre économique majeur, et un taux élevé est perçu comme un obstacle infranchissable vers la propriété. L’idée que Trump pourrait favoriser une baisse de ces taux, en raison de ses positions en faveur de la dérégulation et de la réduction des dépenses fédérales, a renforcé son attrait auprès des électeurs qui peinent à financer leur logement dans des conditions actuelles de taux restrictifs.

Cette anticipation a donc contribué à polariser le vote, avec des électeurs voyant en Trump une promesse de relâchement économique et une potentielle diminution des coûts immobiliers. En revanche, l’élection de Harris était perçue comme un risque de maintien, voire de hausse, des taux actuels, ce qui a pu dissuader certains électeurs de soutenir une continuité démocrate en matière de politique économique.

B. Économie et “voting économique” : une sanction contre l’administration en place

Le “economic voting” est un phénomène bien documenté en science politique économique, qui désigne la tendance des électeurs à réagir aux conditions économiques immédiates en tenant l’administration en place pour responsable de leurs difficultés financières.

Lorsque l’économie est en crise, comme c’est actuellement le cas avec les coûts du logement et les taux hypothécaires élevés, les électeurs cherchent souvent des alternatives politiques, espérant que l’arrivée d’un nouveau dirigeant apportera des solutions plus efficaces. Dans cette élection, ce mécanisme de sanction a joué un rôle central dans la défaite de Kamala Harris, candidate démocrate associée à l’administration Biden.

En bref, à la recherche des alternatives politiques, les électeurs américains n’ont pas reconnu cette alternative dans le programme des démocrates.

Pour de nombreux Américains, les démocrates n’ont pas su endiguer la crise du logement ni répondre à la flambée des prix, un échec d’autant plus difficile à accepter pour les électeurs de la classe moyenne, qui consacrent une part croissante de leurs revenus à leur logement​. Après un enthousiasme démesuré suite à la victoire de Joe Biden, cette situation a alimenté un mécontentement profond amenant de nombreux électeurs à se tourner vers Donald Trump

En période de crise, le “voting économique” devient un outil puissant pour exprimer un besoin de changement. Pour les électeurs, il s’agissait moins d’un soutien inconditionnel à Trump que d’une volonté de s’éloigner des politiques perçues comme inefficaces de l’administration démocrate. En somme, ce vote traduit un désir de rupture avec le statu quo, porté par des électeurs déçus qui aspirent à des solutions alternatives pour alléger le fardeau financier notamment lié au logement.

Election américaine : Une leçon à retenir pour la gauche européenne 

L’élection présidentielle américaine de 2024 a mis en évidence le rôle important de la crise du logement dans le choix des électeurs, notamment ceux du camp démocrate. Exacerbée par une hausse continue des prix immobiliers, des taux hypothécaires élevés et une pression croissante sur le pouvoir d’achat des ménages, cette crise a alimenté un sentiment d’urgence économique qui a de toute évidence orienté les votes. 

Pour beaucoup d’Américains, le logement est plus qu’une question de budget : c’est un pilier de leur stabilité et de leurs perspectives de mobilité sociale. Les électeurs, en particulier les classes moyennes, ont donc cherché des réponses concrètes aux difficultés auxquelles ils sont confrontés au quotidien, et leur choix a été influencé par la perception des candidats et de leurs programmes politiques pour résoudre cette crise.

Kamala Harris, en tant que candidate démocrate et représentante de l’administration en place, a porté le poids des frustrations économiques des électeurs, malgré un programme de soutien aux primo-accédants et des propositions de financement pour les logements abordables. Cette association à l’administration Biden, perçue comme incapable d’apporter un véritable soulagement face à la crise, couplé à une impression d’un programme sans ambition a joué contre elle, renforçant la volonté de changement chez les électeurs. 

À l’inverse, Donald Trump a su capitaliser sur ce mécontentement en se positionnant comme une alternative promettant des solutions radicales pour relancer l’offre de logements. Il serait faux de penser que seul son positionnement xénophobe et climato-sceptique a pesé. Son discours pro-marché, axé sur la libération des terres fédérales et une réduction des réglementations, a résonné comme une solution pour une partie de l’électorat, notamment les familles de la classe moyenne en quête d’un meilleur accès au logement. Non parce que ces solutions sont bonnes, mais surtout parce que, en face, il n’y avait quasiment rien pour les contrebalancer.

Que Donald Trump mette ces mesures en place ou pas, ce n’est pas la question. Une partie de ces solutions sont en vigueur en France depuis des années avec les résultats qu’on leur connait : une forte crise du logement sans précédent. Il est, par contre, fort à parier que la question du logement restera une variable d’ajustement pour l’administration Trump.

Si la question de logement l’a, en partie, fait gagner cette élection grâce aux voix des indécis et d’une partie des électeurs démocrates, Donald Trump sait très bien que les attentes de la base de son électorat sont beaucoup plus orientées vers des mesures fortes nationalistes et conservatrices. Elles ne manqueront malheureusement pas si on fait le bilan de sa première période présidentielle. 

La situation, et notamment la crise du logement, est tellement critique qu’il n’est plus possible de se contenter des mesures superficielles. Il faut des propositions profondément systémiques. Si les politiques peuvent se tromper dans leur stratégie de campagne, la population, quant à elle, ne se trompe pas dans son vote. 

En courant derrière un électorat conservateur, qu’elle n’aura jamais, et à force d’éviter un programme radical, de rupture et résolument progressiste, la gauche, américaine comme européenne, ne peut trouver que de la défaite et des échecs sur son chemin. 

Ainsi, ce n’est pas tant la victoire de Donald Trump que la défaite de Kamala Harris qui doit nous interpeler et nous servir de leçon. 


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Auteur : Edward Condel
Grâce à ma double affiliation, française et américaine, j'ai eu cette chance de pouvoir exercer mon métier d'agent immobilier, et puis formateur, de deux cotés d'Atlantique, depuis 25 ans. Aujourd'hui, à coté de mes activités dans mon centre de formation en négociation immobilière, je participe activement au développement de Garage&Grenier. Vous pouvez donc m'avoir comme consultant pour vous accompagner dans vos projets. Je signe assez souvent les articles du blog, notamment en lien avec la vente immobilière, l'analyse des marchés et des tendances.

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